L’expérience des soins palliatifs vécue par deux proches pousse Carol Kushner à militer pour les autres

1er novembre 2012

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Le décès difficile de deux êtres chers continue d’inspirer Carol Kushner, qui milite aujourd’hui en faveur des soins de santé fondés sur la compassion. 

La meilleure amie de Carol est décédée paisiblement cette année, après des semaines marquées par l’amour et le rire. En comparaison, la mort du père de Carol, survenue il y a 30 ans, a été une épreuve bien cruelle. 

« Le paradis et l’enfer », raconte Carol, analyste des politiques de santé et coprésidente de Patients pour la Sécurité des patients du Canada (un programme d’Excellence en santé Canada dirigé par des patients), dont les opinions sont influencées par ses deux expériences personnelles. 

« Mon père était un bon vieux monsieur qui aimait la chasse et la pêche, confie Carol. Il adorait rire, cuisiner et surtout jardiner. » 

Ken Wilson, raconte-t-elle, était l’une de ces personnes qui ont le don de saisir pleinement la vie. Il était en santé et en pleine forme jusqu’à ce qu’en décembre 1971, à l’âge de 60 ans, il reçoive un diagnostic de cancer du côlon. 

Le premier traitement a semblé une réussite, mais au printemps 1972, il a commencé à ressentir des douleurs dans les jambes et dans la colonne vertébrale. 

« Il était assez évident que ces douleurs allaient l’accompagner jusqu’à sa mort, dit Carol, et malheureusement, elles étaient difficilement maîtrisables. » 

Ken souhaitait mourir à la maison, et son vœu a été exaucé. Mais le soutien à domicile de longue durée pour les patients et leurs familles était chose rare à cette époque. 

Ken était à l’agonie quand il a développé une importante plaie de lit au bas de sa colonne vertébrale, laquelle aurait pu être évitée si la famille avait su qu’il fallait le retourner dans son lit fréquemment. On ne lui administrait que de l’aspirine et du 292 pour soulager ses douleurs. Carol, sa mère et sa tante se sentaient frustrées et impuissantes. « Je ne peux pas vous dire à quel point c’était terrible pour nous de le voir souffrir autant, dit Carol. Je ne peux pas décrire le stress que nous vivions. Il souffrait tellement qu’il voulait qu’on le tue. Il voulait s’enlever la vie lui-même, mais il n’en avait plus la force. » 

Durant les quatre dernières semaines de sa vie, Ken a finalement reçu de la morphine, et une certaine paix est venue l’apaiser, lui et sa famille. 

« Ma meilleure amie, Lorraine Brown, est décédée à la fin du mois de janvier cette année, raconte Carol. Elle avait un cancer en phase terminale – elle savait depuis longtemps qu’elle n’en survivrait pas et elle voulait mourir à la maison. » 

Pour Carol, cette expérience a été totalement différente. 

Premièrement, le personnel infirmier et de soutien a expliqué aux proches de Lorraine comment assurer son confort et sa sécurité. 

Le médecin de famille de Lorraine, à la tête des soins palliatifs de la région, lui a aussi rendu visite chaque semaine. 

L’état de Lorraine était grave, du moins physiquement. Elle ne pouvait plus se nourrir ni se rendre à la salle de bain. Elle était branchée à une pompe pour l’injection d’analgésique, à une pompe gastrique ainsi qu’à des tubes pour la nourrir et lui administrer des médicaments. 

Carol s’est installée chez Lorraine et a participé à l’administration des soins, y compris les injections. Elle a aussi aidé Lorraine à se retourner lorsqu’elle n’a plus été en mesure de le faire toute seule. 

La famille et les amis savaient qu’ils devaient demeurer vigilants quant au lavage des mains et à l’hygiène. 

« Cela peut sembler étrange à dire, mais mon amie Lorraine et moi – ainsi que mon mari et le sien – avons eu beaucoup de plaisir au cours de ces cinq semaines, dit Carol. Je suis très fière qu’elle n’ait eu aucune infection ni détérioration de la peau jusqu’à son décès. Elle ne souffrait pas, et ce fut une expérience extraordinairement édifiante, en comparaison avec la dure traversée vécue avec mon père. » 

Carol s’attendait à ce que Lorraine veuille parler du bon vieux temps, de tout ce qu’elle avait fait et de tous les endroits qu’elle avait visités. Mais cela n’a pas été le cas. 

« Tout ce qui l’intéressait, c’était le moment présent, raconte Carol. Cela a été vraiment enrichissant pour moi, parce que j’ai appris à vivre l’instant et à ne pas m’accrocher au passé ou à ce qui allait arriver. » 

Le rire l’emportait sur le ridicule, se souvient Carol. Par exemple, Carol appelait les petites brosses utilisées avant les injections, les « tampon-chimio ». Son amie pouffait de rire à chaque fois, raconte-t-elle. 

Deux semaines après son arrivée à la maison, après l’hôpital, Lorraine a demandé à ce que sa ligne de nutrition soit retirée. 

Tout le monde savait ce que cela signifiait, mais personne ne s’y est opposé. 

Selon Carol, les gens doivent pouvoir choisir où et comment ils vont mourir. Le système de santé vise à juste titre à sauver et à prolonger la vie, mais elle est d’avis qu’il devrait aussi être intimement lié à la mort elle-même. 

« Je souhaite que le système de santé soit empreint de plus d’humanité, d’empathie et de bonté, dit Carol. Nous sommes des êtres humains. Tout le monde mérite d’avoir la meilleure mort possible. 

De nos jours, nous en savons beaucoup plus sur les façons d’y arriver. Ce n’est pas facile. Cela demande beaucoup de temps et c’est difficile, mais c’est tellement gratifiant de pouvoir améliorer les choses pour quelqu’un à un moment aussi crucial. » 

Après avoir vécu la mort de son père, puis celle de son amie, Carol Kushner est bien placée pour reconnaître l’importance de pouvoir compter sur un système de santé basé sur la compassion et la bienveillance. 

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